Ne minimisez pas l’impact du risque climatique sur votre entreprise !
Dernière mise à jour : 10 nov. 2020
Le réchauffement climatique est une réalité dont les conséquences sont déclinées au quotidien dans les médias ou dans nos conversations. Cette réalité a modifié nos consciences, nos gestes et nos pratiques quotidiennes. Mais elle n’a pas encore atteint les entreprises et leur approche de la gestion des risques. Pourtant, il est urgent d’intégrer les risques climatiques dans leurs stratégies.
Rappel de quelques phénomènes naturels liés à l’activité humaine
Nous savons que l’augmentation de la température liée au réchauffement climatique a de multiples conséquences, et est vecteur de profonds changements. Certains d’entre eux sont déjà visibles et se manifestent par des événements extrêmes sur l’ensemble du globe : des ouragans, des débordements de cours d’eau, ou encore des incendies de grande ampleur. D’autres se structurent lentement mais auront aussi des impacts critiques sur les hommes, les infrastructures, et les activités humaines. A titre d’exemple, l’augmentation des températures et la variabilité des paramètres climatiques (modification des périodes de reproduction des phénomènes, de la quantité et de la durée) entrainera des difficultés d’accès et une baisse de qualité de l’eau en raison du tarissement de certaines sources. Elle développera, selon les experts, la prolifération de nouvelles bactéries appauvrissant les récoltes et générant de nouvelles maladies chez les animaux et les hommes.
Dans ce contexte, si une baisse de la température de 5°C ne représente qu’une variation normale de température entre l’hiver et l’été dans certaines régions, elle peut être beaucoup plus problématique dans d’autres. En effet, cette réalité peut avoir des impacts différents selon les régions, qui n’auront pas toutes les mêmes ressources et capacités pour s’en protéger. Nous oublions que toutes les zones du globe ne subiront pas les mêmes variations au même moment. Lorsque certaines verront leur température augmenter de 1°C, d’autres seront soumises à une hausse de 10°C et seront incapables d’y faire face. Souvenons-nous ainsi qu’il y a 20 000 ans, lorsqu’il faisait 5°C de moins dans l’hémisphère nord, on pouvait passer de l’Alaska à la Sibérie à pied.
Entreprise et climat : des échelles de temps différentes
La fonte des glaces, l’effondrement de la biodiversité, ou encore l’accélération des manifestations de sècheresse, sont des événements naturels engendrés par l’activité humaine. Si plus personne n’y est insensible aujourd’hui, les entreprises n’ont pourtant pas encore fait le lien entre ces bouleversements et les potentielles conséquences sur leurs activités.
Déjà parce que la temporalité des évènements générés par le changement climatique n’est pas la même que celle des affaires. La feuille de route d’une entreprise déroule une vision stratégique sur 3 à 5 ans alors que les mutations évoquées sont évaluées sur plusieurs décennies en matière de climat. A titre d’exemple, les 1,5 °C d’augmentation de température devraient être atteint à compter de 2040 selon le GIEC (Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat). Ensuite parce qu’il est difficile, voire impossible, d’évaluer les futurs impacts de ces changements. Les conséquences sont en effet quantifiables uniquement en cas de sinistre. Il y a un donc un décalage cognitif lié à des échelles de temps différentes et à une impossibilité de se figurer les impacts.
Et pourtant, bien que diffus, les risques économiques liés au réchauffement climatique sont certains et critiques. Personnels, infrastructures, exploitations, et opérations, toutes ses composantes sont menacées. Il est alors plus que temps pour les entreprises de parvenir à se représenter clairement les liens entre le monde écologique et le monde économique. Mais aussi de faire correspondre les messages des experts climatiques avec ceux des dirigeants d’entreprises.
Quels risques pour les entreprises ?
Ces scénarios, bien qu’inquiétants, n’indiquent pas clairement leurs conséquences pour les entreprises. La complexité, l’accumulation, et l’enchevêtrement des phénomènes brouillent les radars et ne facilitent pas la compréhension de l’ampleur des risques auxquels les entreprises sont exposées. Et pourtant, ils sont réels. Risques directs ou indirects, à court, moyen ou long terme, ils sont dans tous les cas exogènes et non maitrisables. En voici plusieurs exemples :
- Le risque de relocalisation des zones d’attractivité économique
Plusieurs secteurs d’activités, à l’instar de celui de l’agriculture, vont être soumis à certains des impacts brutaux décrits plus haut. Entrainant par exemple le développement de nouvelles maladies dans les élevages et les récoltes, mais aussi pour les collaborateurs. Des déplacements de populations (composées de clients et de collaborateurs) vers des zones moins exposées et au climat plus tempéré sont alors à prévoir. Et cette nouvelle mobilité impactera fortement l’organisation logistique et organisationnelle des entreprises.
- Le risque de complexification de la gestion des ressources humaines
Avec les possibles augmentations des maladies cardiovasculaires ou pathogènes évoquées précédemment, les conditions de travail des collaborateurs pourraient devenir plus pénibles. Il conviendra alors de trouver de nouvelles manières de s’adapter aux nouveaux besoins des employés. Mais aussi de recruter de nouveaux profils, ou former les employés aux compétences adaptées à des nouvelles taches. Comme celles relatives à des changements de procédés de fabrication par exemple.
- Le risque d’intensification réglementaire
Afin de contenir au mieux les impacts du réchauffement climatique et d’endiguer leur propagation, les différents gouvernements, de manière collective et/ou individuelle, devraient renforcer la pression règlementaire sur les entreprises. Cela sera le cas par exemple dans le secteur des transports, avec des limites imposées sur les distances parcourues, sur les types de véhicules utilisés, ou avec la mise en place de nouvelles taxes telle que la compensation carbone aux frontières. Si un cadre général est déjà donné par les directives de KYOTO (quota d’émission de CO²) et par les engagements du Grenelle Environnement, nos entreprises devront composer avec de nouvelles restrictions imposées par des autorités publiques locales. Il faudra alors que les entreprises redoublent d’efforts en matière de conformité règlementaire et d’agilité.
- Le risque de réorientation des investissements publiques stratégiques
En parallèle, les investissements publiques se réorienteront vers des projets plus éco-responsables, plus souvent labellisés, soucieux du respect de l’environnement et de l’image projetée aux administrés. Les entreprises devront tendre vers de nouvelles certifications, adapter leurs processus et procédés de fabrication pour s’adapter à ces exigences et aux changements d’orientations stratégiques des politiques publiques (nature des projets mais aussi soutiens financiers). Les exemples de grands projets de rénovation ou d’amélioration d’infrastructures existantes se développent en Afrique et en Inde. En 2019 il a ainsi été décidé que le Plan Directeur de l’Eau et de l’Assainissement sud-africain consacrerait un investissement de plus de 60 milliards de dollars sur une période de 10 ans pour remédier aux pénuries d’eau qui touchent le pays depuis 2017.
- Le risque de modification des outils de production
Les mesures règlementaires pourraient s’étendre à l’utilisation de certains matériaux. Dans le secteur de l’industrie par exemple, l’utilisation du plastique, de l’aluminium, de l’acier, ou encore du charbon, pourraient être limités ou interdits. Ce qui impactera tous les outils, modes et délais de production qui devront être renouvelés.
- Le risque d’image
Les consommateurs souhaitant de plus en plus consommer responsable, les entreprises se devront de leur fournir des produits et services à la hauteur de leurs attentes. Que cela concerne les emballages, les transports en circuit court, ou encore des modes de fabrication respectueux de l’environnement et des animaux, il s’agira de satisfaire ces exigences afin de préserver sa réputation et d’éviter des sanctions juridiques.
- Le risque de baisse de rentabilité de la production
Repenser les implantations locales, la gestion des ressources humaines, les modes de transports, la conformité règlementaire, les matières premières et les outils de production entrainera nécessairement des investissements massifs. Concomitamment, l’augmentation des importations pour faire face à la baisse des ressources locales dans certains secteurs d’activité (notamment dans agroalimentaire) entraînera une baisse de rentabilité des activités. Il faudra alors prévoir, au moins sur le court et moyen terme, une réduction importante des marges financières des entreprises.
- Le risque financier et économique
Les risques précédents pourraient entrainer l’augmentation des primes d’assurances, mais aussi des taux d’intérêts et une dégradation des conditions d’accès aux prêts imposés par les banques. La baisse de rentabilité des investissements mobiliers et immobiliers liés aux restructurations pourrait aussi démobiliser certains investisseurs. Certaines entreprises, plus exposées aux changements climatiques, devront aller jusqu’à la modification de leur modèle économique et repenser l’orientation de leurs investissements comme en témoigne l’histoire de la Compagnie des Alpes. Pour rappel, en 2011, la Cour des Comptes préconisait déjà au géant économique de la région Auvergne Rhône Alpes de privilégier le développement durable à l’augmentation du débit des remontées mécaniques et de l’offre d’hébergement. De plus en plus soucieux et attentifs à cette réalité, les analystes financiers s’interrogent à la prise en compte du risque climatique dans la valorisation des entreprises. Si aujourd’hui le WAX (Worldwide Asset Exchange) n’intègre pas officiellement de données liées au risque climatique, nous devrions voir arriver dans les prochaines années de nouveaux indicateurs de performance (type Gaïa Rating) sur cette thématique entraînant à terme des modifications dans l’évaluation financière des entreprises. Des fonds d’investissement orientés ISR (Investissements Socialement Responsables) se développent dans ce sens et visent ainsi la promotion de dossiers essentiellement « green ».
Comment gérer efficacement ces risques ?
Toutes les entreprises doivent prendre en compte ces risques dans leurs futures stratégies de développement, d’implantation, de production ou encore de marketing. Il s’agit en effet d’élaborer une feuille de route stratégique précise et exhaustive, intégrant de nouveaux indicateurs de performance en matière de développement durable et cartographiant clairement les risques et impacts qui leurs sont associés à court, moyen et long terme.
Cette feuille de route devra être complétée par un Plan de Continuité d’Activité (PCA) et un Plan de Gestion de Crise (PGC) afin d’être prêt et serein face aux incertitudes. Ces plans devront être adaptés aux menaces et aux vulnérabilités réelles, et proposer des solutions de contournement adaptées aux politiques publiques locales de gestion de crise.
Les entreprises pourront aussi s’appuyer sur l’arrivée de nouveaux partenaires développant des solutions et des produits innovants pour réduire l’impact écologique de leurs activités ou de celles de leurs clients et diminuer leurs besoins en ressources naturelles telle que la société OMBREA en propose aujourd’hui pour le secteur agricole.
Enfin, nos dirigeants peuvent aujourd’hui compter sur la possible émergence de nouveaux systèmes d’assurance alternatifs, proposant des solutions à contrepied des dispositifs de couverture traditionnels. L’assurance paramétrique s’appuierait ainsi sur des données de qualité, non contestables, pour raccourcir le délai entre la survenance d’un événement et son indemnisation par un assureur.
Grâce à cette gestion solide des risques et des assurances adaptées, les dirigeants d’entreprise pourront être en mesure de mieux appréhender les changements à venir et leurs impacts sur leurs activités stratégiques et opérationnelles.